Le poète 𝐌𝐚𝐫𝐜 𝐀𝐥𝐲𝐧, à qui la SGDL rendait hommage à l'Hôtel de Massa début octobre, nous a quittés le 7 décembre 2025. La Société des Gens de Lettres s'associe à la peine de son épouse Nohad Salameh, de ses proches et amis, en présence desquels nous célébrions l'œuvre de Marc Alyn il y a seulement quelques mois.
Il avait reçu le Prix Max Jacob à 20 ans et créé la collection Poésie/Flammarion, où il fit découvrir entre autres Bernard Noël, et Andrée Chedid, après quoi il voyagea : "𝑉𝑒́𝑛𝑒́𝑡𝑖𝑒, 𝑆𝑙𝑜𝑣𝑒́𝑛𝑖𝑒 𝑒𝑡 𝑐𝑒𝑡𝑡𝑒 𝐵𝑜𝑠𝑛𝑖𝑒 𝑚𝑦𝑠𝑡𝑒́𝑟𝑖𝑒𝑢𝑠𝑒 𝑜𝑢̀ 𝑚’𝑎𝑡𝑡𝑖𝑟𝑎𝑖𝑡 𝑙𝑒 𝑠𝑜𝑢𝑣𝑒𝑛𝑖𝑟 𝑎𝑟𝑑𝑒𝑛𝑡 𝑑𝑒𝑠 𝐵𝑜𝑔𝑜𝑚𝑖𝑙𝑒𝑠 𝑓𝑟𝑒̀𝑟𝑒𝑠 𝑗𝑢𝑚𝑒𝑎𝑢𝑥 𝑑𝑒 𝑛𝑜𝑠 ℎ𝑒́𝑟𝑒́𝑡𝑖𝑞𝑢𝑒𝑠 𝐶𝑎𝑡ℎ𝑎𝑟𝑒𝑠. 𝑃𝑙𝑢𝑠 𝑡𝑎𝑟𝑑, 𝑐𝑒 𝑓𝑢𝑡 𝑙𝑒 𝐿𝑖𝑏𝑎𝑛 𝑒𝑡 𝐵𝑦𝑏𝑙𝑜𝑠, 𝑐𝑖𝑡𝑒́ 𝑠𝑖𝑥 𝑓𝑜𝑖𝑠 𝑚𝑖𝑙𝑙𝑒́𝑛𝑎𝑖𝑟𝑒, 𝑙𝑖𝑒𝑢 𝑑𝑒 𝑛𝑎𝑖𝑠𝑠𝑎𝑛𝑐𝑒 𝑑𝑒 𝑛𝑜𝑡𝑟𝑒 𝑎𝑙𝑝ℎ𝑎𝑏𝑒𝑡 [...] 𝐴𝑖𝑛𝑠𝑖 𝑛𝑎𝑞𝑢𝑖𝑡 𝑚𝑎 𝑡𝑟𝑖𝑙𝑜𝑔𝑖𝑒 𝐿𝑒𝑠 𝐴𝑙𝑝ℎ𝑎𝑏𝑒𝑡𝑠 𝑑𝑢 𝐹𝑒𝑢 ( 𝐵𝑦𝑏𝑙𝑜𝑠, 𝐿𝑎 𝑃𝑎𝑟𝑜𝑙𝑒 𝑝𝑙𝑎𝑛𝑒̀𝑡𝑒, 𝐿𝑒 𝑆𝑐𝑟𝑖𝑏𝑒 𝑒𝑟𝑟𝑎𝑛𝑡) 𝑞𝑢𝑒 𝑗𝑒 𝑐𝑜𝑚𝑝𝑜𝑠𝑎𝑖 𝑑𝑒̀𝑠 𝑚𝑜𝑛 𝑟𝑒𝑡𝑜𝑢𝑟 𝑑𝑒́𝑓𝑖𝑛𝑖𝑡𝑖𝑓 𝑎̀ 𝑃𝑎𝑟𝑖𝑠 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝑙𝑒𝑠 𝑎𝑛𝑛𝑒́𝑒𝑠 90. 𝑆’𝑒𝑛𝑠𝑢𝑖𝑣𝑖𝑡 𝑢𝑛𝑒 𝑔𝑟𝑎𝑣𝑒 𝑚𝑎𝑙𝑎𝑑𝑖𝑒 𝑞𝑢𝑖 𝑑𝑒𝑣𝑎𝑖𝑡 𝑚𝑒 𝑝𝑟𝑖𝑣𝑒𝑟 𝑑𝑒 𝑙’𝑢𝑠𝑎𝑔𝑒 𝑑𝑒 𝑙𝑎 𝑝𝑎𝑟𝑜𝑙𝑒 𝑝𝑒𝑛𝑑𝑎𝑛𝑡 4 𝑎𝑛𝑠. 𝐶𝑒𝑝𝑒𝑛𝑑𝑎𝑛𝑡, 𝑙’𝑒́𝑐𝑟𝑖𝑡𝑢𝑟𝑒 𝑑𝑒𝑚𝑒𝑢𝑟𝑎𝑖𝑡 𝑒𝑛 𝑚𝑜𝑖 𝑝𝑙𝑢𝑠 𝑣𝑖𝑣𝑎𝑛𝑡𝑒 𝑞𝑢𝑒 𝑗𝑎𝑚𝑎𝑖𝑠 : 𝑈𝑛𝑒 œ𝑢𝑣𝑟𝑒 𝑓𝑜𝑛𝑑𝑎𝑚𝑒𝑛𝑡𝑎𝑙𝑒 𝑒𝑛 𝑝𝑟𝑜𝑠𝑒 𝑐𝑜𝑚𝑚𝑒 𝑒𝑛 𝑣𝑒𝑟𝑠 𝑑𝑒𝑣𝑎𝑖𝑡 𝑛𝑎𝑖̂𝑡𝑟𝑒." (extrait de son discours lors de la soirée qui lui était consacrée à la SGDL)
Lors de la cérémonie d'adieu à Marc Alyn qui s'est tenue le mardi 16 décembre 2025 au cimetière du Père-Lachaise, le président de la SGDL, l'écrivain Christophe Hardy, a prononcé cet hommage, et lu deux poèmes de Marc ALYN que nous vous donnons à lire ici :
" Chère Nohad, chers amis,
Il y deux mois, c’était début octobre, la SGDL avait l’honneur et le plaisir de rendre hommage à Marc Alyn. Marc était présent, fatigué mais bien présent, attentif et manifestement heureux d’être là, aux côtés de vous, chère Nohad, aux côtés des amis qu’il avait choisi de convier à cette fête.
Pour ceux qui l’ont vécue, et pour moi-même, cette fête reste un magnifique souvenir, « un miracle de poésie et d’amitié » pour reprendre les mots mêmes de Marc. Un moment rempli d’émotion, de chaleur, d’admiration, d’attention portée à la voix de Marc dont la force et la beauté éclataient à travers tous les poèmes lus ce soir-là par d’autres voix que la sienne.
Marc était célébré pour l’ensemble de son parcours de poète et d’écrivain. Et il avait, ce soir d’octobre, à l’hôtel de Massa, le bonheur de voir son nom associé au Grand Prix de poésie SGDL devenu désormais Grand Prix de poésie SGDL-Marc Alyn. C’était notre façon – sans doute la meilleure – d’honorer une œuvre pleinement accomplie et de témoigner notre gratitude pour celui qui nous l’avait offerte.
Difficile d’imaginer que Marc nous quitterait si vite. Mais il y a ce souvenir. Il y a surtout, bravant l’absence, contredisant le silence que la mort prétend installer, la présence pour toujours des écrits de Marc. Sa voix dont nous sommes privés définitivement aujourd’hui, il nous appartient de la faire vivre, d’en prendre soin, de la perpétuer.
Aussi ai-je tenu, au terme de ce bref mot d’hommage, à commencer ce travail de perpétuation, que d’autres bien sûr poursuivrons, en vous faisant entendre deux poèmes de Marc."
Le premier est extrait du recueil Liberté de voir, que Marc a composé à l’âge de 18 ans. Il a pour titre : « Une étincelle de voyance »
« Chaque souffle est une heure
il importe de durer
pour un instant d’éternité.
On me dit : donne-nous ta vie
et tu auras ta place dans le vivier des pierres
coupe ton cœur et jette-le
dans le ciment froid des mémoires.
Ah ! vos promesses de larmes
jamais taries
vos blessures toujours ouvertes !
J’apprendrai à mourir comme j’ai appris à lire
dans l’avenir
dévoré par les astres
car je suis mon miroir mon théâtre mon public
et si je m’applaudis c’est pour mieux me punir
de n’être pas aussi grand que mon ombre.
Mon royaume pour une étoile !
Et pour ceux-là qui voyagent
dans les mille chemins de mon cœur
un étincelle de voyance
embrasant les ronces du sang.
Le monde : boue stagnante
où la pépite brasille dans l’obscur.
Le monde : cette lentille de cristal
cet œil gigantesque dardé vers la nuit
n’est-il pas comme moi un songe ?
Il me faudra l’éternité pour croire à mon existence. »
Le second poème de Marc que je voudrais vous lire est un poème d’amour, il appartient au recueil Le Livre des amants, publié en 1988 et récompensé par le Grand Prix de la Société des Poètes français.
Il s’intitule « Précédé par mon cœur », et je vais le lire spécialement pour vous chère Nohad.
« Pour venir jusqu’à toi je prends toutes les routes
j’emprunte des chemins qui n’existent qu’en moi.
– Qui suis-je ? Est-ce l’oubli ? – Qui fuis-je ? Est-ce le doute ?
J’avance. Un coq de braise aux carrefours flamboie.
Moi, levé de bonne heure ou plutôt de bonheur
dans la ronde de nuit où les lampes bleuissent,
je marche sur les mots précédé par mon cœur
vers celle qui m’invente en son grand songe lisse.
Je cueille un cri, un fruit, un astre au ciel immense,
je puise à la fontaine une fraîche élégie
car tout est poésie à qui va en silence
boire à même l’amour entre ses mains qui prient. »
>> Lire également l'hommage du poète Sylvestre Clancier : ICI
>> Télécharger l'hommage rendu à Marc Alyn par Christophe Hardy : ICI
